Franck Gavlvaing, HR VP Industrial Services - Daher
Depuis plus de 15 ans, Franck accompagne la transformation des entreprises à travers différents postes au sein de la fonction RH.
Diplômé du CIFFOP, il a travaillé dans des secteurs industriels tels que le nucléaire, les dispositifs médicaux, l’ingénierie et l’aéronautique, en France et dans de nombreux pays à l’étranger.

Quels sont vos enjeux actuels et comment les adressez-vous ?
Actuellement, notre principal enjeu réside dans la création du 4e pilier de l’entreprise, avec la mise en place d'une nouvelle division dédiée aux services industriels. Cette initiative est rendue possible par le rapprochement et l’acquisition de la société AAA, spécialisée dans les services industriels, et qui permet d’élargir notre présence, en France et à l’international. Cela représente 4 000 salariés à travers plusieurs pays.
La manière dont nous adressons cet enjeu est par un plan d’intégration structuré, mené en amont de l’acquisition. Cette phase s’est avérée essentielle, car les fusions-acquisitions sont toujours des moments sensibles et complexes, et nous savons que cela ne se fait pas en quelques mois. La transition est longue et nécessite une attention particulière.
Côté RH, l’un des aspects les plus challengeant de ce processus réside dans l’harmonisation des rémunérations, un sujet clé, car il touche directement les employés des deux entités – celle que nous avons acquise et celle qui intègre. Cette question est d’autant plus intéressante et stimulante pour moi, car elle m’a permis de me positionner sur des aspects stratégiques qui sont au cœur de l’activité de Services et des relations humaines au sein de la division !
Comment imaginez-vous leurs concrétisations dans 5 ans ?
Dans cinq ans, je vois la concrétisation de cette fusion par le renforcement de notre position de leader sur le marché. L’objectif est de devenir un acteur incontournable, capable d’accompagner nos clients sur tous les territoires. Nous avons d’ores et déjà une présence dans les zones clés et cette expansion géographique sera un levier majeur de notre croissance.
Notre plan de croissance est ambitieux, non seulement en termes de chiffre d’affaires, mais aussi en termes de diversité de nos activités et de notre rayonnement. En atteignant ces objectifs, nous pourrons affirmer que notre positionnement de leader dans ce secteur est pleinement concrétisé, validé par une forte présence, une croissance soutenue et une expertise reconnue à l’échelle internationale.
Quels sont les difficultés et questionnements que vous rencontrez dans la mise en place d’initiatives environnementales et sociales?
Le secteur aéronautique est en pleine transformation pour prendre en compte les enjeux de décarbonation, nous n’observons pas ne connaît pas de crise de vocation, plus de 25 000 postes ont été pourvu l’an dernier au niveau du secteur. Côté Daher nous adressons ces enjeux de deux manières, tout d’abord la décarbonation des produits que nous fabriquons (scope 3) puis la décarbonation de nos activités.
Concernant la décarbonation de nos produits, nous avons lancé 3 Techcenter sur chacun de nos métiers (Log’in pour la logistique, Shap’in pour les aérostructures et Fly’in pour l’avion) qui ont pour objectifs d’innover pour la décarbonation. Deux initiatives majeures se démarquent, d’abord, le développement du projet Ecopulse en collaboration avec Safran et Airbus au sein de Fly’in, qui a permis de créer un démonstrateur d’avion hybride. Ce projet a déjà permis à un prototype de voler pendant plus de 6 heures en mode électrique, et constitue un élément clé pour atteindre les objectifs de décarbonisation du transport aérien. Ensuite, nous travaillons sur le développement de nouveaux matériaux composites au travers de Shap’in pour la construction d’aérostructure, permettant de rendre les avions encore plus légers et contribuant ainsi à la réduction des émissions de carbone.
En ce qui concerne la décarbonation de nos activités, de nombreuses initiatives sont mises en place sur nos sites de production ou nos sites tertiaires pour diminuer nos consommations énergétiques, des projets d’adaptation de nos sites aux nouveaux enjeux climatiques sont aussi lancés pour se préparer aux 20 prochaines années.
Concernant les enjeux sociaux, un point majeur est la mixité dans un environnement traditionnellement très masculin. Aujourd’hui, seulement 16% de femmes composent ma division, ce qui montre une difficulté à attirer des talents féminins dans ce secteur. L’objectif est clairement d’augmenter la part des femmes. Cependant, il n’existe pas de solution miracle ; cela nécessite un travail de fond sur le long terme, notamment avec les écoles, ; nous travaillons avec des associations comme Elles Bougent pour sensibiliser les femmes dès le collège à l’intérêt de ces métiers. Il n’y a aucune raison qu’elles ne puissent pas exercer ces métiers avec succès, et il est important de briser les stéréotypes et de favoriser leur intégration dans l’industrie.
Comment gérez-vous la tension et la pénurie de talents?
Depuis la période post-COVID, avec la reprise des activités, la pénurie de talents s’est intensifiée. Aujourd'hui, cela reste un enjeu majeur pour de nombreuses entreprises, notamment pour répondre aux besoins en ressources nécessaires au redémarrage des activités.
Pour y faire face, nous mettons en place plusieurs actions, en particulier autour de la formation. Une tendance de fond est la création de nos propres centres de formation, comme le Daher Learning Center à Toulouse, ou de programmes de certification, afin de rapprocher des personnes moins expérimentées du secteur et de les intégrer efficacement dans nos équipes. Cela permet de pallier la pénurie de talents tout en cultivant un vivier de ressources qualifiées et adaptées à nos besoins.
Comment abordez-vous la révolution de l’IA ?
La révolution de l'IA représente un changement profond, surtout lorsqu'on considère que les nouvelles générations, déjà familiarisées avec ces outils, arrivent sur le marché du travail. Contrairement aux générations précédentes, qui n'ont pas grandi avec ces technologies, les jeunes d'aujourd'hui ont une appétence naturelle pour l'IA. Ils sont habitués à utiliser des outils comme ChatGPT, ce qui transforme la manière dont ils abordent le travail.
En tant que professionnel de la fonction RH, nous devons nous adapter à cette évolution, tout en repensant notre rôle en tant que managers.
L'IA, en étant capable d'apporter une base de données et des réponses instantanées, pourrait affecter la dynamique traditionnelle entre le manager et ses équipes. Plutôt que de demander une simple directive à un supérieur, ces nouvelles générations auront le réflexe de chercher une réponse rapide via des outils d'IA. Cela pourrait diminuer l'impact de la parole du manager, car l'IA fournira des réponses enrichies provenant de vastes bases de données.
Cette situation impose une transformation dans notre façon de gérer, d'orienter et d'accompagner ces jeunes talents, en tenant compte de cette réalité technologique. Cela va non seulement influencer la gestion des ressources humaines mais aussi la manière de travailler et de manager. Nous devons repenser nos pratiques et trouver des solutions pour intégrer l'IA de manière positive et stratégique dans nos processus de gestion.
Le livre, le film et le lieu qui continuent de vous inspirer ?
En ce qui concerne les livres, j’aimerai en mentionner deux… mais d’un auteur. The Elephant and the Flea de Charles Handy, un auteur que j'ai découvert pendant un programme à Sciences-Po. Ce livre explore les différentes dynamiques entre les grandes entreprises et les structures plus petites, humaines. Un autre ouvrage de lui, The 2nd Curve, m’inspire également beaucoup, car il aborde des thématiques liées au business et notamment l'importance de ne pas rester dans une position d'attente quand tout va bien. Cela résonne particulièrement avec la manière dont je vois les carrières professionnelles et la gestion des évolutions des individus au sein d'une organisation. Ce genre de réflexion est essentiel pour amener les salariés à se projeter dans des trajectoires de croissance et de maturité.
Côté cinéma, bien que je ne sois pas un grand cinéphile, j'ai aimé le film Invictus. Ce film, qui retrace une partie de l’histoire de Nelson Mandela et de l’Afrique du Sud à travers la coupe du monde de rugby. Il montre comment ce sport, en tant que vecteur d’unité, a joué un rôle central dans la réconciliation nationale et dans la construction d'une nation arc-en-ciel. C’est une belle leçon sur le pouvoir fédérateur de l'esprit d’équipe.
Enfin, pour ce qui est du lieu qui m'inspire, je suis originaire d'Annecy, mais l’endroit où je vais régulièrement me ressourcer est Flaine. Bien que ce ne soit pas la station la plus glamour, elle a un attrait particulier pour moi. La montagne, quelle que soit la saison, est un lieu qui se transforme constamment, et c’est cela qui me plaît. Que ce soit en hiver, avec la neige, ou en été, lorsque la nature reprend ses droits, il y a toujours quelque chose de nouveau à découvrir. C’est un lieu idéal pour prendre du recul et réfléchir tant professionnelles que personnelles.
Votre devise ?
Je me réfère souvent à la citation de Nelson Mandela : 'Je ne perds jamais, soit je gagne, soit j'apprends'. Cette phrase est puissante, car elle nous aide à voir les choses sous un angle positif. Elle nous enseigne qu'il y a toujours un apprentissage dans les échecs. Parfois, il est important d'accepter que tout ne soit pas parfait, car « l'échec » peut aussi apporter de la valeur. Charles Pépin, dans son livre 'Les Vertus de l'échec', aborde cette idée et montre comment l'échec peut être une étape bénéfique dans notre parcours.
Comentários