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"Il y a deux ressources inestimables dans la vie : le temps et l’énergie que nous consacrons à nos projets. L’argent, lui, va et vient."


Rémi Camus, Explorateur


Rémi Camus ne raconte pas d’histoires, il les vit et vous les fait partager.

Hier Chef de rang dans un grand restaurant, il en est sorti pour dépasser des limites à priori infranchissables : La descente du Mékong du Tibet au Vietnam, la traversée de l’Australie en courant, le tour des côtes françaises à la nage…Ce qu’il nous dit.

Au moment où tout le monde est en quête de sens, l’aventure est un chemin de vérité, mais pas l’aventure sur-médiatisée. Pour exister, on a tous besoin d’oser, de sortir de nos propres limites non pas pour frôler la mort, mais pour rendre nos vies plus belles. Modestement, sans faux-semblant, Rémi Camus accompagne tous ceux qui veulent faire l’expérience d’un moment d’aventure riche d’enseignements.




Qu’est-ce qui te pousse à entreprendre des expéditions aussi extrêmes, et comment parviens-tu à surmonter les moments de doute ou de fatigue mentale pendant tes aventures ?


J’ai entrepris mes expéditions parce que j’avais besoin de me découvrir, de savoir qui était Rémi Camus. Aller à ma propre rencontre, discuter avec moi-même, explorer mes limites... C’était une quête profonde. Je voulais sortir de ma zone de confort, me confronter à l’inconnu, et découvrir des choses viscérales, dans ma chair, dans mes tripes. En Australie, j’avais même signé un pacte avec moi-même : vivre l’expérience à 100 %, quitte à aller jusqu’à mes dernières limites.

Au-delà de l’aventure personnelle, il y avait aussi ce besoin de mener un projet à terme. Quand on est jeune, on déborde d’idées, on commence beaucoup de choses, mais on finit rarement. J’avais envie de briser ce cycle, de dire : ‘Je vais jusqu’au bout.’ Mon aventure, c’était un cycle complet : la mise en place, la traversée, l’arrivée à Darwin, et le retour. Boucler la boucle.


Ces expériences m’ont aussi transformé sur le plan humain et sensibilisé à des causes essentielles. Par exemple, lors de ma traversée en Australie, j’ai souffert du manque d’eau au point de boire ma propre urine. Cette épreuve m’a ouvert les yeux sur l’importance de l’accès à l’eau potable. Depuis, c’est devenu un combat central pour moi.


Les expéditions extrêmes me permettent aussi de porter des messages forts, notamment sur l’environnement. J’essaie de sensibiliser un maximum de personnes. Par exemple, depuis mon Tour de France à la nage en 2018, j’ai vu une réelle prise de conscience : la création d’ONG, des jeunes qui s’investissent pour protéger le milieu marin... Ces signes montrent que les choses avancent. Aujourd’hui, en tant que père, ma motivation est encore plus forte. Quand ma fille sera en âge de me questionner sur l’état du monde, je veux pouvoir lui répondre : ‘Oui, j’ai fait tout ce que je pouvais. J’ai donné tout ce que j’avais pour faire bouger les lignes. À ton tour, si tu le souhaites, de continuer ce combat.’


Les doutes, bien sûr, ils sont omniprésents. Une expédition, c’est un mélange d’incertitudes et de préparation. On ne peut pas tout maîtriser. C’est comme en sport : un athlète de haut niveau peut s’entraîner des mois pour un 50 mètres nage libre, tout préparer à la perfection, mais il reste toujours des variables imprévisibles. En aventure, c’est pareil, mais à plus grande échelle. Il faut accepter que des imprévus viennent bouleverser le plan initial.


Pour avancer, je m’appuie sur une méthode : fixer des micro-objectifs. Visualiser uniquement l’arrivée finale d’une aventure longue de plusieurs mois peut être décourageant. En revanche, se concentrer sur des étapes intermédiaires – une journée, une semaine – permet de rester motivé. Et parfois, il est bon de se retourner et de regarder le chemin parcouru. Ces petites victoires redonnent de la confiance et permettent de continuer.


J’aime comparer cela à la descente d’une rivière en hydrospeed. Si tout n’est qu’une ligne droite, c’est ennuyeux. Si ce n’est qu’une succession de rapides dangereux, c’est épuisant. L’important, c’est d’anticiper, de naviguer avec prudence et de savourer les moments où l’on surmonte les obstacles. Et surtout, quand on se retourne pour regarder ce qu’on a accompli, se dire : ‘Waouh, j’ai fait tout ça.’ C’est ce mélange d’efforts, de surprises, et d’adaptabilité qui rend l’aventure – ou n’importe quel projet – si passionnante.



Tes expéditions sont souvent accompagnées d’un message écologique. Selon toi, comment les explorateurs peuvent-ils inspirer le grand public à adopter un mode de vie plus respectueux de l’environnement ?


Les explorateurs portent souvent un message écologique, mais ce rôle peut s’avérer complexe. Il est délicat de sensibiliser au respect de l’environnement tout en reconnaissant les contradictions inhérentes à ce mode de vie, notamment les déplacements nécessaires pour atteindre des régions reculées.

Prenons l’exemple d’un projet d’expédition scientifique que je devais mener au Groenland. L’objectif était de prélever des échantillons de glace pour étudier la virologie et la bactériologie, notamment les virus et bactéries millénaires libérés par la fonte des glaces. Ces recherches sont cruciales, car nos systèmes immunitaires modernes ne sont pas préparés à affronter ces agents pathogènes d’un autre temps. Toutefois, un tel projet implique des moyens logistiques significatifs, comme l’usage d’avions ou d’hélicoptères, qui peuvent sembler contraires à un engagement écologique.


C’est là qu’il est essentiel d’expliquer la différence entre une expédition scientifique visant à répondre à des enjeux environnementaux globaux et un voyage d’agrément. L’objectif n’est pas de partir à l’aventure pour le plaisir, mais de contribuer à la recherche et à la sensibilisation. Malheureusement, les réseaux sociaux simplifient souvent ces questions complexes, se limitant à une critique immédiate sans considérer les objectifs de fond.

Les explorateurs ont un rôle privilégié : ils peuvent témoigner de la fragilité de la planète grâce à leurs expériences directes. Lors de mes séjours dans des régions reculées, comme en Australie ou en Afrique, j’ai pu échanger avec des communautés locales qui vivent en harmonie avec leur environnement. Ces rencontres permettent de comprendre des modes de vie différents et d’acquérir une perspective unique que nous, explorateurs, avons la responsabilité de partager.


Cela dit, l’exploration ne doit pas être perçue comme une compétition ou une quête d’image parfaite sur les réseaux sociaux. Une aventure peut être vécue de manière significative près de chez soi. Je me souviens d’une émission avec Michel Cymes et Adriana Karembeu, où ils ont réalisé l’ascension du Mont-Blanc. Ce sommet, bien que modeste comparé à d’autres, leur a offert une expérience marquante, empreinte de dépassement de soi. C’est là l’essence de l’exploration : vivre pleinement une aventure, quelle que soit sa portée, et en tirer des enseignements.

En tant qu’explorateurs, nous avons un devoir d’exemplarité et de transmission. Il ne s’agit pas seulement de dire : « Faites ce que je dis, pas ce que je fais », mais d’agir en cohérence avec nos valeurs et de montrer qu’il est possible d’adopter un mode de vie plus respectueux de l’environnement, même à petite échelle. Sensibiliser, inspirer et transmettre un message d’optimisme sont des missions que nous devons porter avec conviction.



En tant qu’explorateur souvent confronté à la solitude, comment gères-tu cet isolement ? Et, paradoxalement, comment tes aventures renforcent-elles la connexion avec les autres et avec la nature ?


J’ai toujours aimé la solitude. Dès mon plus jeune âge, je pouvais passer des heures seul en forêt. Ce n’est pas quelque chose qui me dérange, au contraire : cela m’apaise et me recentre. Être seul, sans bruit, sans distractions, m’offre une liberté et une clarté d’esprit incroyables.

D’ailleurs, j’encourage tout le monde à expérimenter cela au moins une fois. Lors d’une conférence devant des entrepreneurs, je leur ai dit : « Offrez-vous 15 jours de solitude. Laissez tout derrière vous : le travail, les obligations, les téléphones, et partez marcher seul, avec un sac à dos. » Ce type d’isolement permet de renouer avec soi-même et de redécouvrir la notion du temps. Sans distractions, on réalise à quel point une journée de 24 heures peut paraître longue et riche, mais aussi combien nos rythmes sont dictés par des contraintes extérieures.


Dans mes expéditions, cette solitude me pousse à être pragmatique. Seul, on doit tout anticiper et gérer : monter un abri, trouver de l’eau, s’alimenter. Cela force à réfléchir et à optimiser chaque action. C’est dans ces moments que l’on comprend véritablement la valeur des choses et que l’on développe une créativité née de la contrainte.


Paradoxalement, ces aventures solitaires renforcent aussi ma connexion avec les autres et avec la nature. En survie, quand je suis avec un groupe, je vois à quel point la solidarité est essentielle. Chacun a un rôle à jouer pour atteindre un objectif commun. De la même manière, mes interactions avec la nature deviennent plus profondes. Fabriquer une corde ou purifier de l’eau devient un acte de patience et d’humilité face aux éléments.

Enfin, ces expériences m’ont appris une chose essentielle : voyager léger. En expédition comme dans la vie, porter moins permet d’aller plus loin et de profiter davantage de l’instant présent. Chaque choix que l’on fait, qu’il s’agisse du matériel ou de ses priorités, devrait refléter cette quête d’efficacité et de simplicité.



Quels parallèles établis-tu entre tes expéditions et les défis auxquels font face les dirigeants ou les équipes en entreprise, notamment en matière de prise de décision dans l’incertitude et de gestion du risque ?


Pour moi, il n'y a aucune différence fondamentale entre un explorateur et un dirigeant d'entreprise : nous faisons le même travail, mais avec des vocabulaires différents.


L'entrepreneur, par exemple, va lever des fonds pour financer son projet, tandis que l'explorateur sollicitera des sponsors et des partenaires. Les processus sont similaires : on doit présenter un dossier solide, convaincre, et démontrer que le projet est viable.


Quand des jeunes explorateurs viennent me voir avec des idées d'expédition, je leur demande toujours : "Où est ton dossier de présentation ?" Souvent, ils me répondent qu’ils savent ce qu’ils veulent faire et qu’ils n’en ont pas besoin. Mais coucher ses idées sur papier est essentiel. C’est comme aller à la banque pour demander un prêt : si vous y allez sans plan concret, en espérant qu’on vous accorde des fonds par simple enthousiasme, cela n’aboutira pas. Mettre en forme ses idées permet non seulement de clarifier ses objectifs, mais aussi de comprendre ce que l’on ne veut pas faire. Et cela, c’est tout aussi important.


L’exploration et l’entrepreneuriat suivent des étapes comparables.

  • Il y a d’abord la phase de préparation, où l’on construit le projet et anticipe les difficultés.

  • Ensuite vient la réalisation, qui inclut forcément des perturbations. Ces moments de crise sont déterminants : il faut trouver des solutions, mobiliser ses ressources, et garder le cap.

  • Enfin, il y a le retour à la base, cette phase de transition souvent négligée. Comme après une expédition, il faut prendre le temps de redescendre, de souffler, et de réfléchir avant de repartir sur un nouveau projet. Pour un explorateur, cela peut être le temps de raconter l’aventure via des conférences ou des documentaires. Pour une entreprise, cela pourrait être la remise en question d’un produit, ou l’élaboration de mises à jour.


Ce que je constate, c’est que nous avons tous besoin de temps pour digérer nos expériences. L’être humain est capable d’accomplir des choses extraordinaires, mais il ne peut pas passer d’une extrême à l’autre sans transition. Prendre le temps de s’arrêter, de se poser, et de simplement regarder autour de soi est une compétence essentielle, souvent négligée dans notre monde en mouvement constant.


Enfin, il y a deux ressources inestimables dans la vie : le temps et l’énergie que nous consacrons à nos projets. L’argent, lui, va et vient. Mais le temps et l’énergie sont les vraies richesses, et savoir les utiliser avec soin est ce qui nous rend réellement maîtres de nos choix.

 

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